L’antiphrase iro­nique

Si la raille­rie relève de la com­po­sante expres­sive de l’ironie, l’antiphrase relève quant à elle de sa com­po­sante infor­ma­tive et condi­tionne par consé­quent son sens figu­ré. Après avoir per­mis au locu­teur de signa­ler son inten­tion de ne pas employer ni com­mu­ni­quer mais de men­tion­ner ce qu’il exprime afin de prendre quelqu’un pour cible, l’ironie lui per­met de sur­croît, par anti­phrase, de com­mu­ni­quer figu­ré­ment sa propre pen­sée, dont il veut per­sua­der l’interprète. Le pro­duit d’une anti­phrase, le sens figu­ré d’une iro­nie si l’on pré­fère, est donc fort dif­fé­rent de ce qui a été défi­ni pré­cé­dem­ment comme le sens figu­ré d’un énon­cé tro­pique non iro­nique, qui découle quant à lui d’une ultime réha­bi­li­ta­tion de ce qui est expri­mé. Comme nous l’avons obser­vé, bien que la faus­se­té ouverte d’un énon­cé hyper­bo­lique per­mette éga­le­ment au locu­teur de signa­ler son inten­tion de ne pas com­mu­ni­quer mais de men­tion­ner ce qu’il exprime, ce retrait n’est alors que rela­tif et tem­po­raire puisque cer­tains effets expri­més doivent être réha­bi­li­tés au niveau de ce qui est com­mu­ni­qué figu­ré­ment. De cette recon­ver­sion ulté­rieure dépend ce que j’ai appe­lé le bon­heur d’une hyper­bole ou d’une méta­phore. Ce qui est expri­mé dans l’ironie en revanche, on vient de le voir, fait l’objet d’une pré­di­ca­tion péjo­ra­tive impli­cite qui inter­dit sa réha­bi­li­ta­tion ulté­rieure et rend de ce fait la men­tion irré­vo­cable. Les notions de bon­heur et de mal­heur ne concernent en rien l’ironie, car ce qui est alors com­mu­ni­qué figu­ré­ment n’est aucu­ne­ment sous­trait de ce qui est expri­mé littéralement.

L’antiphrase est une consé­quence indi­recte et acces­soire de la com­po­sante expres­sive de l’ironie, à savoir de la pré­di­ca­tion péjo­ra­tive qui per­met à l’ironiste de tour­ner en déri­sion celui qu’il prend pour cible. Étant don­né le carac­tère péjo­ra­tif de cette pré­di­ca­tion qui exclut tout réha­bi­li­ta­tion figu­rée de ce qui est expri­mé, l’interprète est ame­né à consi­dé­rer que le locu­teur, en s’opposant à ce qu’il exprime et à celui qu’il prend pour cible, cherche fina­le­ment à com­mu­ni­quer le contraire, l’opposé de ce qu’il exprime. Ce qui est com­mu­ni­qué figu­ré­ment dans l’ironie peut être défi­ni comme le pro­duit d’un acte d’auto-réfutation impli­cite, comme un ensemble d’effets impli­qués par un tel acte, qui prend pour objet ce qui est expri­mé dans l’énoncé. Pour com­mu­ni­quer figu­ré­ment sa pen­sée l’ironiste réfute impli­ci­te­ment cer­tains effets qu’il pré­tend hypo­cri­te­ment assu­mer, qu’il feint para­doxa­le­ment de prendre à son compte, mais qui cor­res­pondent en réa­li­té à une opi­nion impu­tée à celui qu’il prend pour cible. C’est ain­si que l’ironie consiste notam­ment, comme le sou­ligne Ber­ren­don­ner, « à faire entendre le contraire de ce que l’on dit dans le moment même et par l’acte même où on le dit » (1989, 216) . En affir­mant iro­ni­que­ment que Pierre est un génie, non content de prendre quelqu’un pour cible en lui impu­tant les effets de ce qu’il exprime, le locu­teur com­mu­nique à pro­pos de Pierre, par anti­phrase, un ensemble d’effets contex­tuels assi­mi­lables à ce qu’il aurait pu com­mu­ni­quer lit­té­ra­le­ment s’il s’était conten­té de réfu­ter les effets d’une affir­ma­tion d’autrui sti­pu­lant que Pierre est un génie.

Je pré­cise d’emblée que le pro­cé­dé en ques­tion ne dépend nul­le­ment, comme on l’a par­fois sou­te­nu, du carac­tère asser­tif de l’énoncé iro­nique. Qu’un énon­cé iro­nique prenne la forme d’une ques­tion, d’un remer­cie­ment ou de n’importe quel autre type d’acte illo­cu­toire, il recèle néces­sai­re­ment une anti­phrase. Dans un article récent, Kumon-Naka­mu­ra, Gucks­berg et Brown (1995) sou­tiennent notam­ment que seules cer­taines asser­tions iro­niques sont sus­cep­tibles de don­ner lieu à une anti­phrase, étant don­né qu’on ne sau­rait défi­nir clai­re­ment ce que repré­sente le contraire d’une ques­tion, d’un remer­cie­ment et plus géné­ra­le­ment de tout acte illo­cu­toire qui ne vise pas prio­ri­tai­re­ment à faire recon­naître la véri­té de ce qu’il exprime. Pour eux l’antiphrase ne concerne aucu­ne­ment des énon­cés comme Mer­ci de me tenir la porte ! (à quelqu’un qui vient de vous la lâcher au nez), Quel âge as-tu ? (à quelqu’un qui se com­porte comme un enfant), Encore une tranche de piz­za ? (à quelqu’un qui vient d’en dévo­rer plus que sa part), etc. Or il faut pré­ci­ser que tout acte illo­cu­toire — quelles que soient ses condi­tions de féli­ci­té (au sens d’Austin, 1970) ou encore de satis­fac­tion (au sens de Searle, 1972) — pro­duit des effets contex­tuels, notam­ment pré­sup­po­sés, qui visent à être recon­nus comme vrais. C’est alors sur ces effets que porte l’antiphrase. Dans le cas d’un énon­cé comme Mer­ci de me tenir la porte, par exemple, l’antiphrase porte sur cer­tains effets comme Tu m’as tenu la porte, Tu es bien éle­vé , atten­tion­né, etc., que le locu­teur feint de prendre à son compte à tra­vers son iro­nie. De même lorsqu’on demande iro­ni­que­ment son âge à un adulte au com­por­te­ment pué­ril, c’est pour réfu­ter des effets comme Tu es un enfant, tu as le droit de te com­por­ter ain­si, etc., assi­mi­lés à ce qui est expri­mé dans l’énoncé inter­ro­ga­tif. Dans les cas les plus simples, mais pas for­cé­ment les plus fré­quents, les effets en ques­tion cor­res­pondent à l’intégralité de ce qui est expri­mé dans l’énoncé et peuvent alors être sim­ple­ment assi­mi­lés à ce qui est expli­ci­té au niveau du conte­nu pro­po­si­tion­nel de l’énoncé en ques­tion. Mais même dans le cas d’une simple asser­tion l’antiphrase ne porte sou­vent que sur un sous-ensemble des effets asso­ciés à ce qui est expri­mé. Reve­nons à ce sujet à l’exemple (27):

(27) Dimanche soir sur la place Bel-Air, vers 23 heures, […] est appa­ru en un éclair un redou­table cyclo­mo­teur à l’éclairage scan­da­leu­se­ment défaillant, engin gui­dé à une ter­ri­fiante vitesse par un dan­ge­reux ado­les­cent. Mais un héroïque repré­sen­tant de la force publique, non­obs­tant le réel péril, n’a pas hési­té à inter­pel­ler l’incivique tru­blion et à lui infli­ger sub­sé­quem­ment la ver­ba­li­sa­tion régle­men­taire. (Cour­rier des lec­teurs, 24 Heures)

Dans ce cas l’ironiste ne cherche pas à com­mu­ni­quer figu­ré­ment qu’aucun cyclo­mo­teur n’est appa­ru sur la place Bel-Air, et que nul agent n’est inter­ve­nu pour ver­ba­li­ser. Dans le contexte qui pré­side à l’interprétation de cet exemple, les effets concer­nant l’apparition d’un cyclo­mo­teur ain­si que l’intervention d’un agent de la cir­cu­la­tion sont hors de por­tée de l’antiphrase. Pour accé­der à ce qui est ici com­mu­ni­qué figu­ré­ment, il faut iso­ler dans un pre­mier temps un sous-ensemble d’effets que le locu­teur rejette comme repré­sen­ta­tif du point de vue de celui qu’il prend pour cible, et c’est sur ce sous-ensemble exclu­si­ve­ment que va por­ter l’antiphrase. Une telle pré­ci­sion s’impose, compte tenu du nombre de contre-exemples appa­rents sus­cep­tibles d’être évo­qués pour faire échec à la notion d’antiphrase ironique.

Ain­si selon Kumon-Naka­mu­ra Gucks­berg et Brown, aucune anti­phrase n’est mise en jeu dans l’ironie d’un auto­mo­bi­liste s’écriant J’adore les gens qui signalent avant de tour­ner (à pro­pos d’un quelqu’un qui vient de tour­ner devant lui sans res­pec­ter les conven­tions d’usage), puisque le locu­teur ne cherche nul­le­ment alors à com­mu­ni­quer l’opposé de ce qui est expli­ci­té dans son énon­cé. Or s’il est bien évident que l’ironiste ne cherche pas à com­mu­ni­quer qu’il n’apprécie pas les auto­mo­bi­listes scru­pu­leux qui font usage de leurs feux cli­gno­tants, il n’en reste pas moins que ce qu’il exprime com­prend des effets comme L’automobiliste qui est devant moi a signa­lé son inten­tion de tour­ner, Il est atten­tif à ceux qui le pré­cèdent, J’apprécie son atten­tion, etc., autant d’effets qui sont ici l’objet d’une anti­phrase iro­nique. De même lorsque l’antiphrase porte sur les effets d’un conte­nu pré­sup­po­sé sans néces­sai­re­ment prendre pour objet ce qui est expri­mé au niveau du conte­nu posé. Dans le cas d’une iro­nie comme Sophie a été pri­vée de petits pois , par exemple (si Sophie n’a effec­ti­ve­ment pas eu de petits pois mais ne dési­rait nul­le­ment en avoir), l’antiphrase porte exclu­si­ve­ment sur un ensemble d’effets comme Sophie adore les petits pois, Sophie dési­rait des petits pois, Sophie a res­sen­ti l’absence de petits pois comme une pri­va­tion, etc., qui ne sont pas liés à un conte­nu posé mais à un conte­nu pré­sup­po­sé. Dans les cas de ce genre, dont relèvent éga­le­ment l’exemple (27), l’antiphrase n’entraîne pas néces­sai­re­ment l’invalidation de l’acte illo­cu­toire réa­li­sé glo­ba­le­ment par le locu­teur. Ain­si dans l’exemple sui­vant l’antiphrase ne porte que sur cer­tains effets, notam­ment pré­sup­po­sés, liés à la pré­ten­due supé­rio­ri­té de Moi par rap­port à Lui, sans inva­li­der pour autant la requête du locuteur :

(29) Lui : Quel âge a votre enfant ?
Moi : Cela ne fait rien à l’affaire.
Lui : Quel âge a votre enfant ?
Moi : Et que diable, lais­sons là mon enfant et son âge, et reve­nons aux maîtres qu’elle aura.
Lui : Par­dieu ! je ne sache rien de si têtu qu’un phi­lo­sophe. En voussup­pliant très hum­ble­ment, ne pour­rait-on savoir de mon­sei­gneur le phi­lo­sophe quel âge à peu près peut avoir made­moi­selle sa fille ? (Dide­rot, Le Neveu de Rameau)

Pour plus de sim­pli­ci­té dans l’analyse, nous tra­vaille­rons désor­mais autant que pos­sible sur des énon­cés asser­tifs comme Pierre est un génie, où l’antiphrase consiste à réfu­ter impli­ci­te­ment l’ensemble des effets asso­ciés, ce qui entraîne imman­qua­ble­ment, par contre­coup, l’invalidation de l’affirmation elle ‑même. Quoi qu’il en soit cepen­dant, au-delà des dis­tinc­tions qui pré­cèdent, il importe de noter que l’antiphrase ne consiste jamais à inver­ser la signi­fi­ca­tion d’un mot (ou d’une phrase) auquel le locu­teur a recours pour expri­mer sa pen­sée. Dans une concep­tion de l’ironie comme figure de pen­sée plu­tôt que comme figure de mot, l’antiphrase consiste à réfu­ter impli­ci­te­ment cer­tains effets consti­tu­tifs d’une pen­sée que le locu­teur exprime, dans le but de com­mu­ni­quer une pen­sée opposée.

Compte tenu de leur concep­tion de l’antiphrase comme simple inver­sion de la signi­fi­ca­tion d’un mot ou d’une phrase, cer­tains rhé­to­ri­ciens se sont par­fois deman­dé pour­quoi celle-ci ne pou­vait sys­té­ma­ti­que­ment être assi­mi­lée à une rela­tion entre termes ou pré­di­cats anto­nymes. Voi­ci à ce sujet quelques consi­dé­ra­tions déve­lop­pées par Vossius :

Mais par­fois il semble se pro­duire que, dans l’ironie, ce ne soit pas le contraire qui soit à com­prendre, point que nous avions posé comme essen­tiel dans notre défi­ni­tion. Pour­quoi en effet ne serait-il pas pos­sible de dire à un homme, notre égal par la nais­sance et sous tous rap­ports, mais qui nous trai­te­rait de haut comme si nous lui étions en tout infé­rieurs : « Sans doute, tu nous sur­passes par ta nais­sance, ton savoir et ta for­tune ». Et cepen­dant nous ne juge­rons pas avoir pré­séance sur lui, comme si nous lui étions supé­rieurs ; non, notre seule aspi­ra­tion sera que cet homme, puisqu’il n’est pas supé­rieur, ne se com­porte pas comme s’il l’était. Le sens visé, certes, contre­dit le pro­pos tenu, mais sans en être le contraire : être supé­rieur et être infé­rieur sont des contraires, alors qu’être supé­rieur et ne pas être supé­rieur se contre­disent. Il ne manque pas d’exemples de cette façon de par­ler. En voi­ci un de Juvé­nal [à pro­pos des plantes sacrées dans l’Égypte ancienne]: « Pieuses popu­la­tions, dont les divi­ni­tés poussent dans les jar­dins ! » […] quand le poète appelle « pieuses » ces « popu­la­tions » aux jar­dins des­quelles poussent de telles divi­ni­tés, il n’a [pas] vou­lu [… ] signi­fier par là leur irré­li­gion et leur impié­té : mais en sug­gé­rant par une seconde pro­po­si­tion absurde, que la pre­mière l’est, il a jugé que les Égyp­tiens n’étaient pas du même coup des gens pieux. (1978, 501–502)

La ques­tion débat­tue par Vos­sius concerne l’ensemble des anti­phrases por­tant sur des énon­cés conte­nant une expres­sion gra­duable ou quan­ti­ta­tive. Com­pa­rons à ce sujet ce qui oppose, par exemple, la signi­fi­ca­tion des mots vivant et mort, gar­çon et fille, marié et céli­ba­taire, etc., à celle des mots chaud et froid, grand et petit, bon et mau­vais, beau et laid, etc. On constate immé­dia­te­ment que ces deux ensembles d’oppositions ne sont pas de même nature. Les pre­mières portent sur des termes com­plé­men­taires non gra­duables (on ne peut être plus ou moins vivant ou mort, marié ou céli­ba­taire, etc.), qui ins­taurent une rela­tion séman­tique dite de contra­dic­tion selon laquelle les pré­di­ca­tions être mort et être vivant ne peuvent être toutes les deux vraies ni toutes les deux fausses lorsqu’elles sont attri­buées à un même objet. Les secondes en revanche, qui portent sur des anto­nymes gra­duables, n’instaurent pas une rela­tion de contra­dic­tion mais de contra­rié­té selon laquelle, si les pré­di­cats être chaud et être froid ne peuvent évi­dem­ment être vrais en même temps, ils peuvent par contre être tous les deux faux : si l’un est vrai, l’autre doit être faux (ce qui est chaud n’est pas froid et ce qui est froid n’est pas chaud), mais si l’un est faux, l’autre peut alors être vrai ou faux (ce qui n’est pas chaud peut être tiède et ce qui n’est pas froid éga­le­ment). Or com­ment rendre compte dès lors de ce qui carac­té­rise l’antiphrase comme trans­fert concep­tuel ? Doit-elle être assi­mi­lée à une sub­sti­tu­tion de termes contraires ou contra­dic­toires ? A l’image de Vos­sius — et pour rendre compte du fait que le pro­duit d’une anti­phrase ne sau­rait sys­té­ma­ti­que­ment être para­phra­sé à l’aide d’un terme contraire — les rhé­to­ri­ciens ont par­fois été ame­nés à affai­blir le pro­cé­dé en ques­tion en l’assimilant à un simple opé­ra­teur de néga­tion qui, même s’il est asso­cié à une expres­sion gra­duable, ne semble ins­tau­rer qu’une rela­tion de contra­dic­tion à l’égard de la forme posi­tive cor­res­pon­dante. Inter­pré­té par anti­phrase, (30) aurait ain­si la signi­fi­ca­tion de (31) plu­tôt que celle de (32) :

(30) Pierre est un génie.

(31) Pierre n’est pas un génie.

(32) Pierre est un idiot.

En l’associant à un trans­fert de signi­fi­ca­tion sus­cep­tible d’être assi­mi­lé à l’ajout d’un mor­phème de néga­tion plu­tôt qu’à la sub­sti­tu­tion d’une expres­sion anto­nyme, on a ain­si ten­té d’élaborer une concep­tion de l’antiphrase iro­nique qui ne soit pas entra­vée par la diver­si­té des rela­tions d’opposition lexi­cales ou pré­di­ca­tives. Dans cette optique, l’antiphrase consis­te­rait sim­ple­ment à inver­ser la pola­ri­té expli­cite d’une pré­di­ca­tion à l’aide d’un opé­ra­teur de néga­tion, c’est-à-dire à trans­for­mer, si l’on pré­fère, une asser­tion posi­tive en asser­tion néga­tive (ou l’inverse, par une double néga­tion). Or cette solu­tion, comme nous allons le voir, n’en est pas une, car elle ne résout aucune dif­fi­cul­té. Ce qui est com­mu­ni­qué par anti­phrase dans l’ironie ne sau­rait être res­ti­tué en mani­pu­lant la phrase réa­li­sée, que ce soit par une sub­sti­tu­tion de termes ou par l’insertion d’un mor­phème de néga­tion. Les effets contex­tuels com­mu­ni­qués par anti­phrase iro­nique ne sont aucu­ne­ment l’équivalent des effets d’une asser­tion néga­tive por­tant sur le même conte­nu propositionnel.

S’il n’est pas impos­sible, à la rigueur, de trai­ter (31) comme une para­phrase approxi­ma­tive de ce qui est com­mu­ni­qué par anti­phrase en (30), c’est uni­que­ment en rai­son de la por­té poten­tiel­le­ment réfu­ta­tive de tout énon­cé néga­tif rela­ti­ve­ment à l’énoncé posi­tif cor­res­pon­dant. Il existe en effet au moins deux inter­pré­ta­tions dis­tinctes de (31), selon que la néga­tion est recon­nue comme « des­crip­tive » ou au contraire « polé­mique » (au sens de Ducrot, 1973, 123) ou, si l’on pré­fère, res­pec­ti­ve­ment comme « pro­po­si­tion­nelle » et « indé­pen­dante du contexte » ou au contraire comme « modale » et « dépen­dante du contexte » (au sens de Lyons, 1980, 390). Dans le pre­mier cas, la néga­tion donne lieu à un acte d’assertion néga­tif, mais non réfu­ta­tif. Il s’agit alors sim­ple­ment pour le locu­teur de décrire Pierre, sans s’opposer à un point de vue adverse, en lui attri­buant la pro­prié­té de n’être pas un génie. Mais un tel énon­cé peut éga­le­ment ser­vir à réfu­ter une affir­ma­tion préa­lable, sti­pu­lant que Pierre est un génie, et dans ce cas le mor­phème de néga­tion a une tout autre valeur. Lorsque la néga­tion est polé­mique, le mor­phème de néga­tion a une por­tée méta­dis­cur­sive qui per­met au locu­teur de réa­li­ser un acte illo­cu­toire de réfu­ta­tion consis­tant à nier la véri­té d’une affir­ma­tion anté­rieure, por­tant sur la pro­po­si­tion posi­tive correspondante.

Or l’antiphrase iro­nique per­met au locu­teur de com­mu­ni­quer un ensemble d’effets contex­tuels impli­qué par une pré­di­ca­tion péjo­ra­tive impli­cite, pré­di­ca­tion qui peut être assi­mi­lée à un acte d’auto-réfutation visant à dénier la véri­té de ce qu’il exprime. Plus pré­ci­sé­ment, l’antiphrase est une consé­quence indi­recte de cette pré­di­ca­tion qui relève avant tout de la com­po­sante expres­sive de l’ironie et par­ti­cipe ain­si d’abord de la raille­rie. En signa­lant son inten­tion de ne pas com­mu­ni­quer mais de men­tion­ner ce qu’il exprime à des fins de désac­cord, l’ironiste se donne les moyens, non seule­ment de prendre quelqu’un pour cible en lui attri­buant un point de vue qu’il désigne comme erro­né, mais encore de faire entendre son propre point de vue par anti­phrase. La fin de ce cha­pitre sera entiè­re­ment consa­crée à démon­trer qu’en (30), par exemple, ce qui est com­mu­ni­qué par anti­phrase ne relève pas d’un acte d’assertion néga­tive consis­tant à attri­buer à Pierre la pro­prié­té de n’être pas un génie, mais bel et bien d’un acte d’auto-réfutation por­tant sur le point de vue même que l’ironiste pré­tend hypo­cri­te­ment sou­te­nir à tra­vers son dis­cours en fei­gnant d’affirmer que Pierre est un génie (et, à tra­vers ce point de vue, sur l’opinion d’autrui). Pour accé­der à ce qui est com­mu­ni­qué par anti­phrase en (30), l’interprète pro­cède exac­te­ment comme s’il cher­chait à se repré­sen­ter ce qui peut être expri­mé et com­mu­ni­qué à pro­pos de Pierre en (31), dans un contexte où l’énoncé en ques­tion ser­vi­rait à réfu­ter les pro­pos de quelqu’un qui vien­drait d’affirmer préa­la­ble­ment que Pierre est un génie.

Pour com­prendre l’avantage que l’on retire à assi­mi­ler les effets contex­tuels de l’antiphrase à ceux d’un acte d’auto-réfutation impli­cite plu­tôt qu’à ceux d’un acte d’assertion néga­tive, il n’est pas inutile de s’arrêter un ins­tant sur les pro­prié­tés de la néga­tion des­crip­tive, afin de mon­trer qu’elle ins­taure diverses rela­tions d’opposition séman­tique entre pré­di­cats posi­tifs et néga­tifs, rela­tions tout à fait étran­gères à ce qui est en jeu dans la réfu­ta­tion et l’antiphrase. Contrai­re­ment à ce que semble sup­po­ser Vos­sius, une asser­tion néga­tive n’instaure pas tou­jours une simple rela­tion de contra­dic­tion à l’égard de la forme posi­tive cor­res­pon­dante, comme l’exigerait l’opérateur logique de néga­tion qui dirige en revanche la pro­cé­dure inter­pré­ta­tive de tout énon­cé réfu­ta­tif ou anti­phras­tique. Ce fait s’explique à mon avis si l’on admet que les rela­tions d’opposition entre pré­di­cats posi­tifs et néga­tifs relèvent d’un para­digme d’oppositions concep­tuelles qui n’a rien à voir avec la sim­pli­ci­té de ce qui oppose fon­da­men­ta­le­ment deux points de vue anta­go­nistes dans toute espèce de réfu­ta­tion ou d’antiphrase. Envi­sa­geons à ce sujet un pre­mier exemple d’assertion néga­tive, où le mor­phème de néga­tion s’articule à un terme dési­gnant une quan­ti­té numérique :

(33) Marie n’a pas 20 ans, com­ment veux-tu qu’elle ait déjà trois enfants ?

On a sou­vent noté que la néga­tion désigne ici une quan­ti­té non pas sim­ple­ment dif­fé­rente, mais infé­rieure à la quan­ti­té dési­gnée par le pré­di­cat posi­tif cor­res­pon­dant, infé­rio­ri­té pré­sen­tée de sur­croît comme rela­ti­ve­ment faible. Nul­le­ment sou­mis aux contraintes de l’opérateur logique de néga­tion, (33) ne peut être dit, ni à pro­pos d’une fillette, ni à pro­pos d’une femme de vingt-et-un ans par exemple[1]Cette pro­prié­té de la néga­tion, aus­si incon­tes­table qu’i­nat­ten­due, a sus­ci­té diverses ten­ta­tives d’ex­pli­ca­tion. Voir à ce sujet notam­ment Fau­con­nier (1976), Ans­combre et Ducrot (1983), ain­si que Riva­ra (1990).. Ce n’est que lorsque la néga­tion est polé­mique, lorsqu’elle donne lieu à un acte de réfu­ta­tion, que l’énoncé néga­tif retrouve alors les pro­prié­tés que lui confère l’opérateur logique de néga­tion. Dans le dia­logue sui­vant par exemple — où la néga­tion per­met à A de réfu­ter ce qui vient d’être expri­mé par B — l’âge dési­gné est plus élevé :

(34) A : Lucie a 20 ans.
B : Mais non, elle n’a pas 20 ans ! Elle a déjà trois enfants.

Au sujet du pas­sage de Vos­sius cité pré­cé­dem­ment, on peut sou­li­gner d’autre part que les pro­prié­tés par­ti­cu­lières de la néga­tion des­crip­tive appa­raissent éga­le­ment lorsque cette der­nière s’articule à un terme gra­duable comme grand, beau, laid, etc. Un pré­di­cat comme être beau, être grand peut s’opposer res­pec­ti­ve­ment à ce que Mar­tin (1976, 60) désigne comme un pré­di­cat « contraire » (être laid, être petit), « neutre » (être indé­ter­mi­né, moyen, ni beau ni laid, ni grand ni petit), ou encore « contra­dic­toire » (être petit ou moyen en taille ou en beau­té). Or il appa­raît que la néga­tion des­crip­tive appli­quée à un terme gra­duable ne fonc­tionne pas comme l’opérateur logique qui ne sau­rait évi­dem­ment conver­tir ce genre de pré­di­cat qu’en son contra­dic­toire. Non seule­ment cette der­nière ne per­met pas d’instaurer une rela­tion de simple contra­dic­tion à l’égard du pré­di­cat posi­tif cor­res­pon­dant mais elle n’a de sur­croît pas du tout le même com­por­te­ment selon qu’elle s’articule à un terme non mar­qué comme beau , grand, chaud, gen­til, etc., ou à un terme mar­qué comme laid, petit, froid, méchant, etc. Envi­sa­geons à ce sujet les exemples suivants :

(35) Ce n’est pas beau.

(36) Ce n’est pas laid.

(37) Ce n’est pas gentil.

(38) Ce n’est pas méchant.

(39) Je ne me fie­rais pas à lui.

(40) Je ne me méfie­rais pas de lui.

D’une part, si elle porte sur un terme non mar­qué, la néga­tion des­crip­tive semble alors néces­sai­re­ment conver­tir un pré­di­cat posi­tif en son contraire, et non en son contra­dic­toire, sans tenir compte des impli­ca­tions logiques liées au carac­tère gra­duable de l’opposition en ques­tion : (35) ne signi­fie pas que c’est non-beau (c’est-à-dire, soit laid, soit ni beau ni laid), mais que c’est laid, tout sim­ple­ment. De même, (37) signi­fie que c’est méchant et (39) qu’il faut se méfier. Comme le pré­cise à ce sujet Lyons, « il sem­ble­rait que l’application de la néga­tion pro­po­si­tion­nelle à une expres­sion gra­duable (du type aimer / like) tende tou­jours à pro­duire un contraire, par oppo­si­tion à un contra­dic­toire, que le sys­tème lin­guis­tique lexi­ca­lise le contraire (comme dans le cas de dis­like) ou ne le fasse pas (comme en fran­çais)» (1980, 391–392). Si la néga­tion des­crip­tive porte en revanche sur un terme mar­qué, elle ne sau­rait conver­tir alors le pré­di­cat posi­tif, ni en son contra­dic­toire (comme le ferait l’opérateur logique), ni en son contraire, mais en neutre : (36), par exemple, ne signi­fie, ni que l’objet repré­sen­té se situe dans une zone com­plé­men­taire à celle de la lai­deur, ni qu’il doit être consi­dé­ré comme beau, mais qu’il n’est en quelque sorte ni beau ni laid, entre les deux si l’on pré­fère. Ce n’est que lorsque la néga­tion est polé­mique que l’énoncé retrouve les pro­prié­tés que lui confère l’opérateur logique, comme en témoignent les quatre exemples sui­vants qui sont tous inter­pré­tés selon une pro­cé­dure com­mune, tout à fait dif­fé­rente de celle qui s’instaure en (35) et en (36). :

Mais non, ce n’est pas beau, c’est com­mun, insignifiant.

(42) Mais non, ce n’est pas beau, c’est laid.

(43) Mais non, ce n’est pas laid, c’est com­mun, insignifiant.

(44) Mais non, ce n’est pas laid, c’est beau.

Dans ce cas la néga­tion n’est pas inté­grée à une forme concep­tuelle pré­di­ca­tive qui s’oppose struc­tu­rel­le­ment à la forme posi­tive cor­res­pon­dante selon une rela­tion de contra­rié­té ou de neu­tra­li­té. Étant don­né sa por­tée méta­dis­cur­sive, la néga­tion polé­mique vise sim­ple­ment à éta­blir la faus­se­té de ce qui est expri­mé dans l’énoncé posi­tif cor­res­pon­dant, ce qui implique une simple rela­tion de contra­dic­tion entre formes pro­po­si­tion­nelles. La réfu­ta­tion ne fait que démen­tir l’assertion posi­tive cor­res­pon­dante et, ce fai­sant, elle ins­taure avant tout une rela­tion de contra­dic­tion entre pro­po­si­tions, tout à fait com­pa­tible avec l’opérateur logique. Quel que soit l’enchaînement envi­sa­gé, le locu­teur com­mence ici par réfu­ter un point de vue qu’il juge erro­né, avant de refor­mu­ler a pos­te­rio­ri ce qu’il cherche à com­mu­ni­quer par le moyen d’un enchaî­ne­ment que je qua­li­fie­rais de « rec­ti­fi­ca­tion spé­ci­fiante »[2]Il s’a­git d’un enchaî­ne­ment à fonc­tion d’une part de « rec­ti­fi­ca­tion » (au sens de Moes­chler, 1982, 92), visant à spé­ci­fier le foyer lexi­cal d’un acte de réfu­ta­tion por­tant sur toute une pro­po­si­tion, et d’autre part de « spé­ci­fi­ca­tion », dans le sens où l’en­chaî­ne­ment agit rétro­ac­ti­ve­ment pour limi­ter ce qui est expri­mé dans l’é­non­cé néga­tif (limi­ter l’é­ten­due de ses effets contex­tuels).. En l’absence d’un tel enchaî­ne­ment, c’est uni­que­ment par rap­port à un contexte (c’est-à-dire à tra­vers une infé­rence qui lui per­met d’accéder à un ensemble d’effets contex­tuels), que l’interprète peut être ame­né à spé­ci­fier ce qui est expri­mé en l’assimilant, par exemple, à un ensemble d’effets contraires ou neutres par rap­port à ce qui est expri­mé dans l’énoncé posi­tif correspondant.

Or sur ce point éga­le­ment l’antiphrase fonc­tionne exac­te­ment comme la réfu­ta­tion. Si (45) est iro­nique, ce qui est alors com­mu­ni­qué par anti­phrase peut être para­phra­sé aus­si bien par (41) que par (42), selon le contexte envisagé :

(45) C’est beau ce que tu viens de dire.

L’antiphrase est ain­si fon­dée sur une sorte d’acte d’auto-réfutation impli­cite à tra­vers lequel le locu­teur cherche à com­mu­ni­quer un ensemble d’effets contex­tuels sus­cep­tibles d’entretenir, dans cer­tains cas, soit une rela­tion de simple contra­dic­tion, soit encore, plus spé­ci­fi­que­ment, une rela­tion de contra­rié­té ou de neu­tra­li­té à l’égard de ce qu’il exprime. Comme dans la réfu­ta­tion, la nature de la sub­sti­tu­tion ou de la conver­sion de sens qui relève de l’antiphrase iro­nique peut être de simple contra­dic­tion lorsque le contexte ne per­met pas de prê­ter au locu­teur l’intention de com­mu­ni­quer le contraire ou le neutre, mais elle peut éga­le­ment être spé­ci­fiée impli­ci­te­ment comme visant à com­mu­ni­quer le contraire ou le neutre. La prise en charge d’une pro­po­si­tion contra­dic­toire n’implique pas ana­ly­ti­que­ment la prise en charge cor­ré­la­tive d’une pro­po­si­tion contraire ou neutre (comme le sou­li­gnait Vos­sius, on peut admettre que quelqu’un ne nous est pas supé­rieur, sans admettre du même coup qu’il nous est infé­rieur), mais elle ne l’interdit pas puisque le contraire ou le neutre sont com­pa­tibles avec le contra­dic­toire (si quelqu’un ne nous est pas supé­rieur, il peut être notre égal ou nous être infé­rieur). Dans cette pers­pec­tive, toute anti­phrase ins­taure donc néces­sai­re­ment une rela­tion de contra­dic­tion dont il est pos­sible de déri­ver syn­thé­ti­que­ment, si le contexte l’autorise, cer­taines pro­po­si­tions contraires ou neutres. Voi­ci à ce sujet un exemple d’ironie bien connu où Antoine fait l’éloge de César pour ten­ter de convaincre les citoyens romains de la culpa­bi­li­té de Brutus :

(46) Antoine : Il était mon ami fidèle et juste ; mais Bru­tus dit qu’il était ambi­tieux, et Bru­tus est un homme hono­rable. Il a rame­né à Rome nombre de cap­tifs, dont les ran­çons ont rem­pli les coffres publics : est-ce là ce qui a paru ambi­tieux dans César ? Quand le pauvre a gémi, César a pleu­ré : l’ambition devrait être de plus rude étoffe. Pour­tant Bru­tus dit qu’il était ambi­tieux ; et Bru­tus est un homme hono­rable. Vous avez tous vu qu’aux Luper­cales je lui ai trois fois pré­sen­té une cou­ronne royale, qu’il a refu­sée trois fois : était-ce là de l’ambition ? Pour­tant Bru­tus dit qu’il était ambi­tieux ; et Bru­tus est un homme hono­rable. (Sha­kes­peare, Jules César)

Si le lec­teur per­çoit l’ironie d’Antoine, il est néces­sai­re­ment ame­né à consi­dé­rer que ce der­nier s’auto-réfute impli­ci­te­ment lorsqu’il affirme que Bru­tus est un homme hono­rable, afin de com­mu­ni­quer figu­ré­ment que Bru­tus est tout sauf honorable.

Lors d’une inter­pré­ta­tion très scru­pu­leuse, l’investigation peut s’arrêter là, au niveau de ce que l’on pour­rait appe­ler le degré zéro de l’antiphrase, où s’instaure une rela­tion de simple contra­dic­tion entre ce qui est expri­mé dans l’énoncé et ce qui est com­mu­ni­qué par le locu­teur. Ain­si dans le cas des exemples cités par Vos­sius, l’investigation de ce qui est com­mu­ni­qué par anti­phrase s’arrête en effet à ce pre­mier niveau, sans que l’interprète puisse spé­ci­fier si le locu­teur sou­haite com­mu­ni­quer une opi­nion contraire ou neutre par rap­port à ce qu’il exprime. Dans l’exemple ci-des­sus l’interprète a cepen­dant tout loi­sir de prê­ter à Antoine l’intention de com­mu­ni­quer plus spé­ci­fi­que­ment diverses pro­po­si­tions contraires sti­pu­lant que Bru­tus est mépri­sable, que Bru­tus est un traître, etc. Comme la réfu­ta­tion, l’antiphrase implique néces­sai­re­ment une rela­tion de contra­dic­tion entre ce qui est com­mu­ni­qué et ce qui est révo­qué par le locu­teur, rela­tion qui peut, dans cer­tains cas, lorsque le contexte l’autorise et pour satis­faire au prin­cipe de per­ti­nence, entraî­ner infé­ren­tiel­le­ment une rela­tion de contra­rié­té ou de neu­tra­li­té entre formes pro­po­si­tion­nelles. Ce qu’il importe de noter sur ce point, c’est que la néga­tion des­crip­tive peut fort bien éta­blir conven­tion­nel­le­ment une rela­tion d’opposition entre un pré­di­cat posi­tif et un pré­di­cat contraire ou neutre, alors que l’antiphrase et la réfu­ta­tion ins­taurent sim­ple­ment, à la base, une rela­tion de contra­dic­tion logique entre formes propositionnelles.

 

Notes

Notes
1 Cette pro­prié­té de la néga­tion, aus­si incon­tes­table qu’i­nat­ten­due, a sus­ci­té diverses ten­ta­tives d’ex­pli­ca­tion. Voir à ce sujet notam­ment Fau­con­nier (1976), Ans­combre et Ducrot (1983), ain­si que Riva­ra (1990).
2 Il s’a­git d’un enchaî­ne­ment à fonc­tion d’une part de « rec­ti­fi­ca­tion » (au sens de Moes­chler, 1982, 92), visant à spé­ci­fier le foyer lexi­cal d’un acte de réfu­ta­tion por­tant sur toute une pro­po­si­tion, et d’autre part de « spé­ci­fi­ca­tion », dans le sens où l’en­chaî­ne­ment agit rétro­ac­ti­ve­ment pour limi­ter ce qui est expri­mé dans l’é­non­cé néga­tif (limi­ter l’é­ten­due de ses effets contextuels).